LÉGENDES DE BROCELIANDE : Le miroir aux fées

Brocéliande, Bretagne, Ile et vilaine
Le miroir aux fées

On dit qu’il y a bien longtemps sur cette terre, les plantes, les bêtes, les hommes et tous les êtres du Petit peuple (fées, korrigans, géants…) vivaient en bonne intelligence, en harmonie même.

Mais les hommes, toujours entreprenants, défrichaient sans relâche pour étendre leurs cultures ; ils creusaient la terre pour en extraire la pierre, et puis le fer pour forger leurs outils, mais aussi leurs armes.

Alors, une nuit, tout le Petit Peuple s’est réuni. Longtemps ils ont parlé, et au matin tous devaient en convenir : « Etait venu le temps des hommes ». C’est à ce moment que les géants sont partis vivre dans les plus hautes montagnes du monde. Orcs et trolls ont fui vers les plaines enneigées du nord. Les korrigans, minuscules, n’ont eu qu’à se cacher dans les terriers et bosquets. Et les fées, elles ? C’est bien souvent dans l’eau des ruisseaux, des fontaines ou des lacs qu’elles ont trouvé refuge.

 

Il était alors sept fées, sept sœurs toutes jeunes puisque l’aînée avait à peine 350 ans. Elles aussi ont pris leur envol en quête d’un lieu où vivre à l’abri du regard des hommes. Elles ne sont pas allées bien loin, car au cœur de la forêt, elles ont découvert une vallée paisible, que seul le cri des bêtes, le chant des oiseaux et le vif gargouillis du Rauco animaient. Au bout de la vallée, ce ruisseau s’évasait pour former un petit étang. C ‘est là qu’elles ont décidé de se retirer, et sous les eaux de l’étang elles ont bâti leur demeure. La maison terminée, elles se sont réunies et, levant chacune leur main droite, elles ont fait le serment solennel qu’à partir de ce jour plus jamais elles ne se montreraient aux hommes, jamais.

 

Et c’est ce qui s’est passé. Pour ne pas être surprises par les errances d’un bûcheron ou d’un promeneur, elles restaient tout le jour au fond de l’eau ; et ce n’est qu’à la nuit venue qu’elles sortaient prendre l’air, cueillir les herbes exigées par leurs magies, et pour apprendre encore. Chacune avait sa spécialité, sa curiosité. L’aînée étudiait le pouvoir des plantes, l’autre lisait les étoiles dans la nuit, la troisième scrutait la roche, une autre parlait des heures durant à tous les êtres visibles ou invisibles, la cinquième se plongeait dans l’infiniment petit qui est en toute chose, la sixième cherchait dans l’eau quelques traces de la mémoire du monde… La septième, la plus jeune, était si vive et si curieuse qu’elle voulait tout connaître, tout savoir. Aussi, chaque soir, elle suivait l’une ou l’autre de ses sœurs et partageait chacun de leurs secrets. C’était donc aussi la plus puissante en magie.

 

Longtemps, elles vécurent tranquilles dans la vallée. Cent, deux cents, trois cents… mille ans ont passé sans que jamais aucun homme ne se doute de leur présence. Mais, au bout d’un millénaire, la plus jeune des fées autrefois si vivre devenait morose. Elle ne disait plus un mot. Elle s’ennuyait : tous les jours, enfermée. Souvent pour tromper l’ennui, elle se promenait étendue sur le dos, là, juste sous la surface de l’eau, profitant ainsi des rayons du soleil.

 

Un jour qu’elle nageait ainsi entre deux eaux, elle entendit résonner un bruit inconnu. C’était comme un pas, très lourd, mêlant au son de la corne celui du métal raclant la roche. Et cela s’était arrêté au bord de l’étang. Alors, elle a filé jusqu’à la rive ; et là, juste au-dessus d’elle, elle a vu la tête d’un cheval qui s’abreuvait. Elle lui sourit. Puis son petit cœur de fée s’est mis à battre, car là, juste au-dessus d’elle, un homme se penchait pour se rafraîchir. « Un homme ? pensa-t-elle. Mille ans qu’elle n’en avait pas croisé. » Que deviennent-ils ? Se font-ils encore la guerre ? Quelles nouvelles inventions géniales ? Qui règne sur le monde des hommes ? » Et il y a ce mystère, certaines fées prétendent : « Les hommes ont un étrange pouvoir. Ils ne sont pas magiciens, non. Et pourtant le plus humble d’entre eux peut tenir la plus puissante des fées à jamais prisonnière à ses côtés ».

 

Mille questions lui brûlent les lèvres… Et, bravant le serment, elle jaillit de l’onde et lui apparaît. Le jeune homme reste un moment bouche bée. Ébahi par tant de grâce et de beauté réunies, il est sous le charme.

La fée, de son côté, le trouve bien de sa personne, sans doute un gentilhomme, habillé pour la chasse, il a fière allure. Tout le reste du jour elle va le questionner, parcourant avec lui toute la vallée, lui tâchant de lui répondre au mieux et toujours avec grande courtoisie. Le temps va filer et ce n’est qu’en fin d’après-midi qu’ils rejoignent l’étang. A cet instant, la jeune fée réalise : le soleil est déjà bas dans le ciel et la nuit va venir : « Tu ne dois pas rester là, va-t‘en vite ! » Et le jeune homme, docile, enfourche et talonne sa monture. Le regardant partir, la fée se ravise : « Attends ! Reviens demain, même heure, même lieu ! » D’un signe de la tête il lui répond. Bien sûr qu’il sera là demain. Il n’a plus qu’elle en tête. Alors elle retourne au fond de l’étang. Il était temps. Déjà ses sœurs s’apprêtent pour la nuit. Ses sœurs s’étonnent de la voir rentrer toute guillerette, chantonnant, embrassant le front de l’une, offrant une fleur de nénuphar à une autre. Elle semble soudain pleine de joie. Fatiguée par sa longue marche, la jeune fée s’allonge un instant. Fermant les yeux pour retrouver les images de ce jour, elle s’assoupit. « Il s’est passé quelque chose » pensent ensemble les six sœurs. Aussi, elles forment le cercle et de leurs magies conjuguées, elles lisent dans l’esprit de la cadette. Et elles découvrent l’horrible vérité : « Elle a rompu le serment et, de plus, a laissé cet homme repartir vivant. Il va prévenir les siens. C’en est fini de notre tranquillité. Il nous faut agir ! » Et, reformant le cercle, elles endorment la jeune fée pour tout un jour.

 

Le lendemain matin, le gentilhomme est de retour. Il a mis ses plus beaux habits et n’a qu’une hâte : la revoir. Mais ce n’est pas sa belle fée qui l’accueille. Sortant de l’ombre, jaillissant de l’eau, tombant des branches basses, ce sont les six sœurs qui se jettent sur le malheureux. Cinq d’entre elles le plaquent au sol, tandis que l’aînée, de ses mains, l’étrangle, le tue. Leur sale besogne accomplie, elles s’en retournent au fond de l’eau. Ce n’est qu’à l’extrême fin du jour que la jeune fée s’éveille. Tout de suite, à la lumière, elle réalise : le temps a filé, la nuit tombe déjà, son chevalier ! Elle court, elle nage –on ne sait trop- jusqu’à la berge et découvre le corps inanimé du jeune homme. C’est d’abord grande douleur, et, pour la première fois de son existence, des larmes emplissent ses yeux. Elle se penche et tend sa main vers le beau visage quand soudain elle aperçoit les traces des doigts meurtriers sur son cou. Après la douleur vient la colère, la terrible colère des fées. « Qui a fait ça ? » Elle n’a plus qu’une idée en tête venger la mort de cet innocent. Elle interroge les arbres, les oiseaux « Sui a fait ça ? » Effrayés, ils finissent par lui dire la vérité : « Ce sont tes sœurs. Mais toi seule es coupable, tu avais promis… » Mais déjà elle n’écoute plus. « Ce sont mes sœurs… » et, les yeux pleins de haine, elle retourne dans leur demeure sous les eaux, bien décidée à accomplir sa vengeance.

 

 Cette nuit-là, l’étang va bouillonner, la terre va trembler, tout le val va gronder du vacarme du combat des fées. Au matin, tout est calme dans la vallée. Au fond de l’étang, la jeune fée se tient debout devant ses six sœurs pétrifiées, paralysées par sa puissance. Sans aucune pitié, elle saisit sa petite serpe et, une à une, elle les égorge. Oh, ce n’est pas par cruauté, non. Elle recueille un peu du sang de chacune dedans un bol, y mêle son propre sang et quelques plants de son secret. Ensuite, elle court auprès du corps du chevalier. Entrouvrant ses lèvres, elle verse la portion sanguine dans sa gorge. La poitrine du jeune homme se gonfle, puis ses yeux s’ouvrent à la vie. Alors elle l’embrasse, de toutes ses forces, elle le serre contre son cœur. Et elle décide d’abandonner ce lieu à jamais maudit, et d’aller vivre avec lui, femme parmi les hommes.

 

Et l’histoire pourrait s’arrêter là. Sans doute ils furent heureux. Sûrement, ils eurent beaucoup d’enfants. Mais là, au fond de l’étang, sont six fées du Petit Peuple qui agonisent. Et de leur gorge, le sang va couler, couler, se mêlant aux eaux de l’étang qui va déborder et se répandre. Sept jours et sept nuits durant, le sang des fées, rampant tel un serpent, par-delà les collines et les bois, inondant chaque village, chaque vallée sur des lieux à la ronde va marquer à jamais son passage. C’est pourquoi encore aujourd’hui en Brocéliande, la roche et la terre sont rouges, pourpres du sang des six fées de ce petit étang que l’on nomme le Miroir aux Fées.

Légende de Brocéliande racontée par Beatricéa

 

Crédit photo : Google cco

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Commentaires: 21 (Discussion fermée)
  • #21

    ttesnime (mercredi, 10 juin 2020 22:08)

    Merci pour les pancake

  • #20

    DUPRES (mardi, 10 mars 2020 08:23)

    Bonjour à vous,

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    Cordialement,
    Colombe A. Dupres

  • #19

    pierre gasser (mardi, 10 décembre 2019 18:41)

    Plein de poésie dans cette magnifique présentation de ce charmant village

  • #18

    Jérôme (jeudi, 08 août 2019 08:46)

    Bonjour,
    Merci pour cet article. Juste un commentaire : un dès résultat des travaux est l’envasement de la baie. Alors qu’il y a 10 ans on traversait la baie depuis le bec d’andaine sans problème, aujourd’hui la moitié du trajet de 12 km se fait enfoncé dans la vase. C’est fatiguant, et surtout cela interdit aux personnes âgées voire au jeunes enfants de faire cette sublime traversée. Mais personne n’en parle ! Pourquoi ? ?

  • #17

    Frédérique (dimanche, 27 janvier 2019 18:16)

    Je viens de parcourir votre site et j'ai pris beaucoup de plaisir à découvrir tous ces lieux si riche en information et vraiment très intéressant. Vos reportages témoignent d'un travail colossal et le résultat est digne des meilleurs guides touristiques. Merci beaucoup, j'ai hâte de découvrir vos prochains reportages sur notre belle France.

  • #16

    Justine (samedi, 26 janvier 2019 20:51)

    C’ Très intéressant et beau

  • #15

    Sangare sekou (jeudi, 01 novembre 2018 12:55)

    Oui

  • #14

    Mukendi- Fabrus (samedi, 25 août 2018 16:36)

    Je suis content de votre pogramme j'ai aimé beaucoup

  • #13

    Wazia marcel (vendredi, 24 août 2018 09:36)


    Bonjour,

    Dans le cadre de campagnes de référencement naturel, nous recherchons en permanence des partenaires blogueurs pour des échanges croisés.
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    Wazia Marcel
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    Pays : Scotland
    Code postal : EH1 1DD
    Adresse : Dept 400, 12 South Bridge

  • #12

    Odier (dimanche, 19 août 2018 21:55)

    Très beau reportage sur ces maisons bretonnes

  • #11

    Priscille (vendredi, 20 juillet 2018 17:06)

    Hello sympa cet article pour une nouvelle façon de faire une omelette

  • #10

    vigneron (samedi, 14 juillet 2018 01:06)

    Un merveilleux coin, a visiter pour les vacances en sauvegardant les dunes !!

  • #9

    Priscille (vendredi, 13 juillet 2018 22:20)

    chouette découverte cet article

  • #8

    Francine Ballenghien (vendredi, 22 juin 2018 17:48)

    Très bien écrit, je connais très bien la forêt de Paimponou Broceliande, mais n’y suis jamais allée, après cette lecture, très envie d’y aller

  • #7

    Bfranfcine Ballenghien aFrancine B (vendredi, 22 juin 2018 17:45)

    O

  • #6

    BarbierBarbier PierretteBarbier Pierrette (mardi, 05 juin 2018 18:29)

    Je n'étais pa si loin de Pont Aven quand je suis allée à Bénodet
    Mais sans voiture je n'ai pu m'y rendre. J'adore la Bretagne et je suis toujours avide d'en connaitre d'avantage. Ces images me donnent toujours envie d'en connaitre d'avantage. Merci à vous de me faire découvrir de nouveaux horizons.

  • #5

    Le Marec (mardi, 05 juin 2018 16:35)

    B

  • #4

    Francine Arnott (jeudi, 22 février 2018 17:57)

    Translate

  • #3

    Priscille (mardi, 12 décembre 2017 00:43)

    Hello , oui le beurre avec le disque a emulsifier ca marche pas mal !! et qu'est ce que c'est bon, !! juste avant le beurre on a une mousse de beurre c'est trop bon aussi

  • #2

    Laurine (mardi, 28 novembre 2017 10:26)

    Les articles sont vraiment complet et très bien écrit. Je n'ai pas eu besoin de prendre la visité guidée qui aurait été bien compliquée avec mon fils en bas âge. C'est génial!!! Continuez, je vous adore...

  • #1

    capsek (jeudi, 23 novembre 2017 20:52)

    super


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